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*** ci-dessous "Livres-mystiques".: un hommage à Roland Soyer décédé le 01 Juin 2011

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vendredi 29 novembre 2013

Sur un petit livre de Louis-Claude de Saint-Martin «ECCE HOMO»

Source : forum Maitrespassés de Mariette Cyvard

L'éditeur Paul Derain (rue Vauban, Lyon) a .publié récemment «Ecce Homo»
en réimpression. de l'édition de 1792 et l'on peut dire, comme le
souligne l'éditeur dans un court avant-propos que « ce petit livre a
gardé toute sa valeur et reste actuel ».

Petit livre par le volume, puisqu'il compte moins de cent pages, et
pourtant grande œuvre par la densité de la pensée qu'il contient, Ecce
Homo » a été pour nous un rayon de lumière ; nous nous faisons donc un
fraternel devoir de l'évoquer assez longuement, non pour dispenser de sa
lecture les gens pressés mais, au contraire, pour y inciter les hommes
de bonne volonté, « les hommes de désir » en général et les Martinistes
en particulier.

SAINT-MARTIN montre tout d'abord par des exemples très simples que
l'homme est « une sainte et sublime pensée de Dieu » et nous invite à
nous représenter ce que fut l'homme en tant que tel, avant sa chute, ce
qu'il devrait être... et ce qu'il est en réalité : du fait de sa
dégradation il n'est plus qu'une manifestation opposée à celle qui était
attendue de lui. Au lieu d'être les témoins de la gloire et de la
vérité, nous ne sommes plus que les témoins de l'opprobre et du mensonge.

Frappés par la Justice divine, les suites de notre condamnation,
seraient mille fois plus douces si nous en reconnaissions l’équité et si
nous pensions combien les vues que notre Juge a sur nous pourraient nous
être profitables.

Mais le principe de désordre qui nous a fait déchoir nous poursuit, nous
trompe sur la chute de l'homme, sur ses conséquences, et cherche à nous
persuader que nous ne sommes pas tombés. Ainsi s'explique le soin
perpétuel que l'homme apporte à cacher ses défauts, à leur donner
l'aspect de la vertu et son souci constant de l'opinion de ses semblables.

Ces erreurs constituent autant de pierres d'achoppement pour notre
évolution, mais il en est de plus graves suscitées elles aussi par
l’esprit des ténèbres, et qui ont le terrible pouvoir de tellement
égarer l'homme qu'il ne peut plus retrouver sa voie.

Et Louis-Claude de SAINT-MARTIN établit un frappant parallèle : d'une
part quelques mortels privilégiés qui, ayant eu le double avantage
d'apprendre combien étaient doux et magnifiques ces trésors dont nous
avons joui et combien est ignominieux le néant dans lequel nous nous
sommes plongés, répandaient ensuite leurs instructions sur les autres
hommes ; d'autre part les œuvres enfantées ou infectées par les ténèbres
qui persuadent l'homme, qu'il jouit encore de tous ses droits et lui
dérobent « la vue de ce dénuement spirituel qui est le véritable signe
caractéristique auquel est attaché le nom d'Ecce Homo ».

SAINT-MARTIN dénonce alors ces extraordinaires manifestations dont tous
les siècles ont été inondés, ces abominations et ces erreurs religieuses
qui ont attiré sur des peuples célèbres les vengeances éclatantes de la
colère divine. Il montre comment l'œuvre partielle prend aisément dans
la pensée de l'homme le caractère de l'œuvre totale et comment l'œuvre
de l'esprit lui paraît facilement l'œuvre de la Divinité... Partout les
hommes ont pris pour des missions spirituelles ce qui n'était que des
missions naturelles, pour des missions naturelles ce qui n'était que des
missions ténébreuses et sous-naturelles.

Quels torts les agents mêmes des missions partielles n'ont-ils pas dû se
faire à eux-mêmes en sortant ainsi de leur sphère; et en s'exposant si
imprudemment et sans forces  suffisantes a tous les chocs opposés ou
corrompus de tant d'autres sphères qui devaient à jamais leur rester
étrangères ?

Il y a des multitudes d'institutions sur la terre qui n'ont pas eu
d'autres principes, soit parmi celles qui ont été honorées comme
sacrées, soit parmi celles qui, par des altérations successives, en sont
venues à ne conserver que de puérils emblèmes et se sont totalement
transformées en pures institutions civiles... Ces institutions ont
montré l'espèce de sources dont elles sortaient soit par les règlements
bizarres qu'elles prescrivaient, soit par l'emploi d'ingrédients et de
substances dont la correspondance décèle clairement des régions purement
naturelles que presque tous les peuples de la terre ont adorées comme
étant divines, vu les mélanges spirituels bons ou mauvais dont elles
sont, susceptibles...

Les missions modernes s'éloignent de l'esprit du Réparateur lorsqu'elles
localisent terrestrement le foyer des grâces divines... lorsqu'elles
assujettissent leurs agents à de puériles règles humaines... Si ce n'est
pas le principe des ténèbres lui-même qui les dirige et qui emploie ces
règles pour étouffer la vraie piété, il se peut que ce soit des
individus déjà sortis de ce monde... qui détenus encore dans des régions
inférieures... peuvent conserver des relations terrestres dans l'ordre
de la piété inférieure.

Le Maitre, visant ensuite les merveilles et manifestations revêtues du
nom de la Vierge ou de plusieurs autres créatures privilégiées, dénonce
les abus auxquels elle donnent lieu en soulignant que « nous sommes
appelés à être le signe et le témoin de la divinité et non point à être
le signe et le témoin d'aucun autre être ».

SAINT-MARTIN ne se contente pas de signaler le danger : il nous montre
encore les moyens de nous en prémunir. Au nombre de ces moyens, il place
notamment « les écritures saintes » qui « nous tracent avec exactitude
le lit qui a servi au fleuve vivifiant de l'amour, pour arriver depuis
la montagne sainte jusque dans notre être... ». Toutefois il nous met en
garde, plus loin, contre le « pouvoir funeste... que possède le principe
des ténèbres d'appuyer... ses fausses doctrines et ses [46]
manifestations par les divers témoignages des écritures Saintes ».

Louis-Claude de SAINT-MARTIN a voulu, par cet ouvrage, nous prémunir
contre « cette faiblesse secrète qui nous porte tous à chercher hors de
nous les appuis que nous ne pouvons trouver qu'en nous... ». C'est
précisément cette faiblesse qui nous entraîne vers ces «'missions » qui
relèvent de la voie extérieure, alors que la seule et véritable voie est
celle de « Ecce Homo ».

Car c’est ainsi que l’auteur qualifie la Voie Intérieure, celle de la
Régénération. Ces mots « Voilà l'homme » appliqués jadis au Réparateur
expriment toute notre dégradation. Le Maître veut que-nous en prenions
conscience, que nous ne cachions plus « cet homme de mensonge dans ses
décombres et dans ses immondices ».

Il nous convie, au contraire, « à faire paraître (cet homme) à découvert
afin que l'air vif le corrode jusque dans ses racines, et que le signe
de la mort, se trouvant ébranlé par là, dans ses fondements, puisse
s'écouler et se perdre pour nous au fond de ses abîmes ».

Nous venons par des citations plus ou moins littérales, d'indiquer les
grandes lignes et la pensée maîtresse de ce précieux petit livre qui,
nous n'hésitons pas à le dire, est une œuvre vraiment inspirée au sens
le plus élevé du terme.

Comme toujours en pareil cas, tous les lecteurs ne la ressentiront donc
pas de la même manière et les réflexions qu'elle Suggère peuvent, avec
les sujets, varier presque à l'infini.

C'est donc sans nulle prétention d'être exhaustifs que, n'ayant ni
l'emplacement... ni le talent nécessaires pour en faire l'exégèse, nous
allons en toute modestie consigner en terminant cette présentation
quelques-unes des pensées que notre lecture nous a inspirées.

L'homme « pensée de Dieu »... Définition éminemment réconfortante si
nous songeons que toute pensée, même oubliée de son auteur (et Dieu,
Lui, n'oublie pas !) subsiste en puissance et reste liée à l'être dont
elle émane : nous avons donc la certitude d'être indéfectiblement liés à
notre Principe Suprême, ultime but de notre évolution.

Mais une « pensée de Dieu » ne peut qu'être parfaite... Et pourtant,
comme nous sommes loin de la perfection, de notre perfection primordiale
et glorieuse

Or, nous sommes seuls responsables de notre déchéance, dont SAINT-MARTIN
trouve la source dans « la puissance libre de notre être ! ». Nous le
sentons bien d'ailleurs, mais l'orgueil nous empêche de le reconnaître
et nous nous attachons à masquer « nos difformités par toutes sortes de
membres artifi¬ciels » et à faire illusion sur nos semblables « pour
qu'ils flattent nos oreilles de ce doux nom « d'Ecce Deus ». Voilà le
Dieu, au lieu de ce terrible Ecce Homo qui nous rendrait furieux en nous
couvrant d'ignominie ».
[47]
C'est pour nous parer d'une apparente et facile sainteté que nous nous
tournons vers l'extérieur, que nous prêtons l'oreille aux faux
prophètes, que nous tombons dans les pièges de la piété inférieure au
lieu de nous engager, par « l'Ecce Homo », dans « les sentiers de la
Régénération ».

Ecce Homo ! Ce sont, comme chacun le sait, les mots que prononce Pilate
au moment où il livre à la populace Jésus qui vient d'être couvert d'une
pourpre dérisoire, couronné d'épines, Or, le Gouverneur romain ne se
doutait pas qu'en désignant ainsi cet être à l'aspect lamentable,
sanglant et couvert de crachats, il était, en quelque sorte, le
porte-parole choisi par la Divinité pour inviter l'humanité à prendre
enfin conscience de l'état d'abjection auquel sa faute l'avait réduite.

Car ces deux mots ont un sens profond que la méditation devant le
Crucifix nous aide à mieux comprendre si, renonçant à notre orgueil,
nous nous plaçons dans la ligne indiquée par L.-C. de SAINT-MARTIN.

Le Divin Réparateur a pris à son compte toute notre abjection en portant
« pour nous aux yeux des nations le titre humiliant d' « Ecce Homo », en
laissant, comme le dit le Maitre, immoler sa forme matérielle.

Et ce que nous devons voir dans ce corps torturé qui pend sur le gibet,
c'est la symbolique « peau de bête » revêtue par Adam après la chute,
c'est « le vrai signe de notre réprobation ». Ecce Homo Voilà l'homme
tel qu'il s'est voulu, et non pas tel que Dieu l'avait voulu pour s'y
refléter...

— Le poids qui tire ces bras écartelés, déchirant les mains percées de
clous, ce n'est pas celui de cette « forme corporelle pure » de Jésus,
dont Saint-Martin parle dans « les Nombres » c'est celui de la matière
pétrie de péché...

Et lorsque le supplicié murmure d'une voix dolente : J'ai soif ! c'est
toute l'angoisse de l'homme universel qui s'exprime, c'est la soif de
l'Esprit privé de Lumière et du cœur privé d'Amour...

Nous réalisons ainsi la qualité humiliante exprimée par « Ecce Homo »,
cette dégradation que L.-C. de SAINT-MARTIN vient nous remettre en
mémoire car dit-il « ce n'est qu'en faisant manger chaque jour à nos
esprits le pain d'affliction que nous obtiendrons la régénération de
l'homme ».

C'est pourquoi le Maître nous assure en terminant que « si nous savons
lire dans le Réparateur l'histoire universelle de l'homme », l'Ecce Homo
ne sera plus un titre d'humiliation et d'opprobre mais un titre de
gloire. En effet, « nous devons être sûrs de remonter un jour vers les
régions de lumière, et qu'on dira de nous glorieusement à, notre arrivée
dans les cercles supérieurs, ce qu'on en a dit dans notre origine : Ecce
Homo, voilà l'homme, voilà l'image et la ressemblance de notre Dieu,
voilà le signe et le témoin du principe éternel des êtres, voilà la
manifestation vivante de l'universel axiome ».
Robert DEPARIS.